Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/227

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Et leur faim va cueillir la mousse du rocher,
Autour de la colonne, où l’homme allait chercher
La prière et la paix, aliments de nos âmes.
Hideux comme leurs noms, des reptiles infâmes,
Traînant leurs corps gonfles sur les marbres verdis,
Réchauffent au soleil leurs venins engourdis.
O temps, noir moissonneur de toutes les couronnes,
Aux rosiers d’autrefois quels successeurs tu donnes !

Que d’amères leçons, que d’oracles trop sûrs,
Pendent là, comme l’herbe, aux brèches des vieux murs
C’est tout ce que produit ce sol jadis si riche,
Dontlesmonumentsmèmeaujourd’hui sonten friche ;
Et, plus avili qu’eux, ce terroir odorant,
Qui parfumait le soc et la bêche, en s’ouvrant,
Laisse à peine aujourd’hui quelque fleur fugitive,
Cacher, sous des gravas, sa fraîcheur maladive.
Rampante et sans éclat, c’est toujours une fleur :
Si nos yeux ont pitié de sa pauvre couleur,
Au moins elleest vivante : et, dans ces champs putrides,
Où tout s’offre aux regards sous des teintes livides,
Où l’enfant, qui la cueille et joue avec effort,
Semble une ombre naissante et porte un air de mort,
Son silence offre seul une vie animée.
O ville de parfums, dans la fange inhumée,
Cet humble liseron, fidèle à ton néant,
Parle plus haut pour nous que tes murs dc géant ;