Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/243

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Le pêcheur, sur des flots qu’on disait enchantés,
N’eût jamais promené sa nacelle et ses rêves,
Ou séché ses filets sur le sable des grèves.
Tandis que le bétail, par la soif dévoré,
A l’aspect de ces eaux s’enfuyait altéré,
L’hirondelle, évitant leur torpeur orageuse,
Eût craint d’y rafraîchir son aile voyageuse.

II.
Quelquefois sous un ciel qu’eût envié Tibur,
Où les vents assoupis se berçaient dans l’azur,
L’abîme convulsif se tordait en menace :
Une vase gluante en poissait la surface ;
Arrachés tout à coup de leurs profonds berceaux,
De liquides écueils y mêlaient leurs assauts,
Et les flots, saturés d’une odeur de bitume,
Dégorgeaient sur la berge une fétide écume.
Quand la foudre, au contraire, enveloppant les cieux,
Frappait des rocs voisins le faîte audacieux,
Ou du pin montagnard découronnait la tête,
On voyait sur le gouffre échouer la tempête.
Mille récits d’effroi, par la crainte approuvés,
Planaient comme un brouillard sur ces bords réprouvés.
On donnait pour certain, qu’une voix prophétique
Sortait parfois des plis du lac cabalistique ;
Si quelqu’un du château devait bientôt mourir,