Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/315

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Que de trésors pourtant sollicitent ma voix !
Le grelot du muguet, qui tinte dans les bois,
Comme un bonheur perdu, dont le retour étonne,
L’iris du rendez-vous, l’infidèle anémone,
La noire scabieuse, et le blond réséda,
Qui, parti de Memphis, en Provence aborda,
Et, sous le deuil des buis que sa grâce console,
Cache de la vertu le modeste symbole !
Mais au même banquet comment tout convoquer ?
L’esprit, qui veut tout voir, voudrait tout expliquer.
Respectons cependant la moitié du mystère :
Ménageons-nous au moins un moyen de nous taire.
Lequel nous resterait, si nous apprenions tous
Cette langue rêveuse, et dont les mots si doux,
Semblent, comme nos prés, émailler la science ?
Même, en la recherchant, craignons l’expérience !
On n’apprend à souffrir, qu’à force d’observer :
La rose a des poisons, qu’on finit par trouver.

Les plantes, après tout, quel que soit leur lignage,
De celui qui les donne empruntent le langage.
Si, pour prix de ces vers, j’espérais recevoir
Le nyetage, gardien des rencontres du soir,
Et qu’on ne m’adressât que la sèche ibéride,
Ou du jaune aconit le dédain homicide :
Facile à m’abuser, peut-être que mes vœux
De la pâle hyacinthe y liraient les aveux.