Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/42

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Chacun a sa cabane, et chacun son verger,
Où le travail est pur, et l’orgueil étranger.
Le temps, que ne doit pas occuper la prière,
Se passe à cultiver la terre hospitalière,
Qui fournit tour à tour, sans jamais être en deuil,
Quelques fruits au banquet, quelques fleurs au cercueil.
Comme autre part la nuit, là le jour fait silence ;
Mais lorsqu’à son déclin l’Angélus se balance,
Chacun peut, s’il le veut, bénir tout haut son sort,
Et, pour juger le monde, interrompre sa mort.

IV.
A l’heure où du soleil la splendeur qui déserte
Rougit les peupliers du côté de Caserte,
On voit, de leurs enclos, dans le jardin commun,
Les moines blancs passer, et glisser un par un.
Affranchis de leur tombe, ainsi que des fantômes
A qui Dieu permettrait d’inspecter les royaumes,
Où le mal qu’ils ont fui recommence pour nous,
Tous, des vêpres du jour délassant leurs genoux,
Vont s’asseoir et causer au bord de la montagne.
L’œil y plane sur Naple et toute la campagne.
Un vieux chêne, un vieux banc, en sont le seul trésor :
C’est là qu’en se parlant on semble vivre encor,
Et, pour s’en détacher chaque fois davantage,
Là qu’on vient regarder… toujours le même orage :