Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/424

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PRESSENTIMENTS.

Non, ce temps griset lourd n’est paseequi m’oppresse !
Peut-être ajoute-t-il un voile à ma tristesse ;
Mais l’horizon de l’âme est bien plus ténébreux :
J’ai trop de prévoyance, hélas ! pour être heureux.
De grâce, Maria, pour ce cœur qui vous aime,
Sauvez-moi de l’ennui de songer à moi-même.
Ne me demandez pas, quels perfides poisons
Semblent noircir le cours de mes vertes saisons :
Pourquoi, sous un ciel pur, gardant un front farouche,
Je défleuris des yeux vos bouquets, quand j’y touche !
Je l’ignore. J’entends partout, comme un signal,
Bruire autour de ma vie un oracle fatal ;
Partout, comme un vautour suspendu sur ma joie,
Je sens tourner dans l’air un présage de proie.
Comme l’astre lointain, qui tourmente les mers,
La sphère du malheur régit mon univers.