Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/472

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Des sages ont pensé que ce monde mortel
N’est qu’une ombre en relief de l’Esprit éternel ;
Le poète, à son tour, ne voit, de sphère en sphère,
Qu’un mirage éloquent de l’être qu’il préfère.
Et voilà sous quel prisme, astre pur et serein,
Je te vois, dans ma nuit, briller sur mon chagrin,
Maria, mon bonheur, cher ange, dont le voile,
En touchant une larme, en fait presque une étoile !
Dis hauteurs de l’espace à tes pieds descendu,
J’y respire du ciel un souffle inattendu ;
Et mon culte, altéré de la soif des oracles,
S’abreuve, en t’embrassant, de l’air pur des miracles.

Dieu, l’univers et toi, vous ne formez qu’un tout,
Dont la triple unité se discerne partout :
Et la création n’est qu’une hvmne immortelle,
Qui me parle de toi, comme tu parles d’elle.
Sous l’aimant de l’archet confondant leur rapport,
Comme on voit tous les sons ne former qu’un accord,
On dirait qu’en toi seule une main tutéiaire
Rassemble adroitement tout ce qui peut nous plaire.
Oh ! je t’aime, vois-tu, comme on aime, au printemps,
Le réveil du feuillage et l’exil des autans,
La fraîcheur du matin dans les plaines vermeilles,
Et les roses d’avril, que baisent les abeilles :
Je t’aime, Maria, comme on aime les voix,
Que l’été fait gémir sous l’ogive des bois,