Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/484

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De toi seule entouré, partout mon jeune hommage
Pouvait, à ta présence, ajouter ton image.
Tout est mort maintenant, tout est sombre et blafard :
Ton autel est partout, l’idole nulle part.
Tout creuse autour de moi mon sillon de misère.
Que la félicité qu’on n’a plus est amère !

Avant de te connaître, et quand j’avais vingt ans,
Comme un espoir de toi j’ai chéri le printemps.
Que j’aimais le retour des fleurs sur la colline,
Et sur l’arbre encor noir la verdure enfantine,
De sa voûte ondoyante essayant les réseaux !
Dans les bois réchauffés, que. j’aimais les oiseaux,
Quand, oubliant l’hiver, dont le froid les désole,
Chaque buisson rapporte un orchestre qui vole !
Tout me disait alors : Réponds-y par des vers :
La sève du talcnt brûle aussi dans les airs.
Chercheau bord desruisseaux, dont l’écumeest fleurie,
La paix, qui s’y balance avec la rêverie :
Les lilas entr’ouverts parlent déjà d’amour,
Et la gloire sourit dans un rayon du jour.
Tout m’enchantait alors, et, paré d’allégresse,
Au banquet des jardins conviait mon ivresse.
Rien n’appelle à présent mes transports : ton départ
A desséché mon âme et vieilli mon regard :
Et l’insecte hideux, qui vit dans la poussière,
File, autour de mon luth, sa toile casanière.