Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/502

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Rappelé par l’étude à mes anciens amis,
Si je reprends encor les livres endormis,
Qu’aimait à feuilleter ma veille solitaire,
Ce n’est pas pour m’instruire aux desseins de la terre ;
J’y cherche pour mes maux un secret talisman,
Et dans l’histoire encor je guette le roman,
Les faiblesses d’un homme, et non ses coupsd’épée.
J’abandonne César, je déserte Pompée,
Pour suivre Cléopàtre aux rives de Pharos :
J’ai pitié d’Annibal, qui ne fut qu’un héros :
Alexandre m’occupe aussi peu que l’Asie :
Je ne vois Périclès, qu’au miroir d’Aspasie.
Couverts, dans leurs tombeaux, de voiles moins profonds,
Les siècles plus récents ne sont pas plus féconds.
L’Angleterre d’Alfred remplit encor le monde ;
Mais moi, je sais par cœur celle de Rosamonde.
Le passé n’est pour moi qu’un fleuve limoneux,
Où nagent, dans la nuit, quelques noms lumineux.
Par l’histoire d’Emma je connais Charlemagne :
Et les amours du Cid, voilà pour moi l’Espagne !