Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/509

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Il est nuit dans mon âme, et nuit dans ma pensée.
La nature s’embrase, et ma vie est glacée !
Dois-je donc, prisonnier d’incroyables bivers,
Vivre « t mourir aveugle, enfermé dans mes fers ?
Mon, non : que le soleil, fût-ce à travers ma plaie,
Jette encor dans mon cœur un rayon qui l’égaie :
Il le peut ! Est-ce ici que j’ai droit d’en douter ?
C’est peu de voir le jour, fier de ressusciter,
Éparpiller partout ses flèches créatrices,
Il semble, en les frappant de ses lueurs complices,
Rapprocher de mes yeux ces sommets enchantés,
Que nous avons ensemble, en courant, visités.
Nos glaciers d’autrefois, que Parc-en-ciel festonne,
Semblent encor porter tes regards pour couronne :
Et, ranimé par eux ou par Ion souvenir,
Mon passé qui renaît prend des traits d’avenir.
Oh ! ne me détruis pas l’Éden que je relève :
Je ne l’espère pas, Maria, je le rêve.

Pardonne maintenant si, dans mes vœux jaloux,
Je ne’dis jamais toi sans dire bientôt nous.
Ce n’est pas que je veuille, à mes noires années,
Mêler, malgré le sort, tes blanches destinées :
Oh non ! c’est que je crois t’aimer mieux chaque jour,
Et le plus de bonheur n’est que le plus d’amour.
C’est que je crois encor, qu’ayant, et c’est possible,
Lu le mieux dans ton ame, où tout n’est pas visible,