Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/74

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Le chien même d’Alix (car elle avait un chien)
Allait flairant le sol et ne découvrant rien.
C’est ainsi que la nuit se passa tout entière.
Enfin, comme le jour blanchissait la clairière,
On les vit qui dormaient sur le bord d’un chemin,
Pour réchauffer leurs doigts se tenant par la main.
Sans doute ils auraient dû mourir cent fois pour une !
Mais tandis qu’à genoux, pleurant leur infortune^
Ils criaient au secours à désoler les bois,
Le linot éveillé, qui reconnut leur voix,
Courut en avertir le bouvreuil sédentaire.
Avant que le sommeil les surprît sur la terre,
Les.pinsons le savaient : et tous furent querir
Des feuilles, du coton, du foin, pour les couvrir.
Jusques aux roitelets, si délicats, si frêles,
Qui défirent leurs nids, et même un peu leurs ailes,
Plus de cent mille oiseaux travaillèrent pour eux ;
IIs n’eurent pas trop froid, les petits malheureux.
C’est qu’on se fait du bien, en en faisant aux autres :
Les jours qu’on a sauvés sont le salut des nôtres.
IIs furent, près d’un mois, malades ; mais depuis,
Ils se seraient plutôt jetés au fond d’un puits,
Que de passer la porte, ou d’en tourner le pêne.
Aussi de les gronder on n’avait pas la peine !
Quand on leur avait dit : Faites ceci, cela,
C’était fait. Souvent même ils allaient au delà,
Et nos deux pénitents, toujours pleins de prudence,
De peur de se tromper, obéissaient d’avance.