Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/92

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Roulent autour de nous leurs livides marées :
Les villes, qu’autrefois sa rage a dévorées,
Viennent, se ranimant en houleux tourbillons,
Pour s’écrouler encor, trembler dans ses sillons ;
Les vaisseaux par milliers sortent de ses royaumes :
Chaque vague conduit sa flotte de fantômes.

Les contes, inventés par l’esprit de l’efl’roi,
Et qu’on murmure à bord, quand, pareil au beffroi,
Le vent sonne l’alarme en froissant les cordages,
Ne ressemblent en rien aux récits de vos plages,
A ces vieux fabliaux, qu’autour du feu, le soir,
Le pèlerin raconte, aux veilles de l’ouvroir.
lis ont du nautonier l’audace aventurière,
Une grâce robuste, une franchise altière.
Tombant de la mémoire au milieu du danger,
Autant que le péril ils ont l’air de changer ;
Ils deviennent nouveaux presque à chaque tempête.
Pareils à l’élément, où l’homme les répète,
Ils semblent à la fois, au cœur épouvanté,
Pleins de monotonie, et de variété.
Pour le compas du bord j’ai dédaigné la lyre ;
Mais je l’ai retrouvée au gaillard du navire.
Devenu matelot par amour pour les mers,
Je demeure marin par amour des beaux vers.
Je les vois sous les eaux nager avec les herbes,