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une garantie pour les citoyens, dont elle devrait en même temps exprimer les droits et en assurer le libre et complet exercice, la Loi, disons-nous, n’est plus qu’une arme entre les mains du pouvoir, destinée à le protéger contre les citoyens eux-mêmes. Chaque revendication des citoyens au nom de leurs droits restreints ou méconnus est alors traité d’attentat contre l’autorité et réprimée comme telle.

De là, emploi fatal de la force de part et d’autre.

Seulement, cette force est estimée régulière et légale — par dérision sans doute — lorsqu’elle est employée par le pouvoir contre les citoyens, et dite, lorsque ceux-ci l’emploient au service du maintien de leurs droits, insurrectionnelle si elle échoue, révolutionnaire si elle triomphe, mais en tous cas toujours réputée illégale par les doctrinaires du pouvoir.

Cette distinction même, faite entre la force dite légale en faveur du pouvoir et traitée d’illégale quand elle est entre les mains des citoyens, n’indique que trop que la Loi, par un étrange abus de mots, n’a jamais été considérée, nous le répétons, que comme une arme placée dans les mains de l’autorité — du pouvoir — pour restreindre les droits de tous.

Or, de tous les droits visés par ces restrictions, il n’en est pas que l’autorité en France — sous tous les régimes et jusque sous la Commune, hélas ! — ait plus frappés que le droit de parler, d’écrire, de se réunir et de s’associer.

La Déclaration des Droits, conformément aux principes dont la seule affirmation fit de notre révolution un acte universel, avait reconnu que la faculté d’exprimer sa pensée par la parole et par l’écrit, ainsi que le droit de se réunir et de s’associer, étaient supérieurs et antérieurs à toute constitution, qu’ils ne pouvaient donner lieu à aucune législation spéciale. Les abus et même les crimes qui en peuvent résulter étaient rangés parmi les crimes et les délits de droit commun.