Page:Legouvé - Dernier travail, derniers souvenirs, 1898.djvu/74

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je dis paysagiste, car j’y comprends les peintres comme les écrivains : tous nos artistes, qu’ils aient en main une plume ou un pinceau, qu’ils s’appellent Bernardin de Saint-Pierre ou Loti, George Sand de Valentine, ou George Sand de la Mare au Diable ; Troyon et Daubigny ou Millet, tous sont des descendants directs ou indirects du Promeneur solitaire.

Mais voici un résultat bien plus extraordinaire des idées de Jean-Jacques. Elles ont passé des livres et des tableaux dans les faits ; elles ont produit un changement dans nos mœurs, dans nos habitudes intimes.

Dans ma jeunesse, la bourgeoisie n’allait pas à la campagne. C’était une habitude, un privilège réservés à l’aristocratie. Les grandes familles séjournaient longtemps dans leurs terres, et les femmes y continuaient le rôle des châtelaines d’autrefois.

Aujourd’hui le goût de la vie de la campagne fait partie de notre vie à nous tous, bourgeois petits ou grands. Quelle est la femme de magistrat, d’avocat, de médecin, de commerçant, d’écrivain, d’artiste, qui n’ait pas, pour objet d’ambition, une habitation plus ou moins importante dans un village, où l’on plante, dans un terrain à soi, des arbres à soi, et où