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Page:Leibniz-en.francais-Gerhardt.Math.1a7.djvu/13

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semblable, et cependant avant que de l’avoir defini, on ne sçauroit donner des démonstrations naturelles de plusieurs propositions importantes de métaphysique et de mathématique. Apres avoir bien cherché, j’ay trouvé que deux choses sont parfaitement semblables, lorsqu’on ne les sçauroit discerner que per compraesentiam, par exemple, deux cercles inégaux de même matière ne se sçauroient discerner qu’en les voyant ensemble, car alors on voit bien que l’un est plus grand que l’autre. Vous me direz : je mesureray aujourdhuy l’un, demain l’autre ; et ainsi je les discerneray bien sans les avoir ensemble. Je dis que c’est encor les discerner non per memoriam, sed per compraesentiam : parce que vous avez la mesure du premier presente, non pas dans la mémoire, car on ne sçauroit retenir les grandeurs, mais dans une mesure materielle gravée sur une regle, ou autre chose. Car si toutes les choses du monde qui nous regardent, estaient diminuées en même proportion, il est manifeste, que pas un ne pourrait remarquer le changement. Par cette définition je demonstre aisément des propositions très belles et tres generales, par exemple que deux choses estant semblables selon une operation ou considération, le sont selon toutes les autres ; par exemple soyent deux villes inegales en grandeur, mais qui paraissent semblables parfaitement, lorsqu’on les regarde au coslé oriental, je dis qu’elles paroistront aussi semblables, quand on les regardera du costé occidental, pourveu que à chaque veue on découvre toute la ville. Cette proposition est aussi importante en Métaphysique et même en Geometrie et en Analyse, que celle du tout plus grand que sa partie. Et neantmoins personne que je sçache l’a énoncée. On démontre par la aisément le theorerae des triangles semblables qui semble si naturel, et qu’ Euclide demonstre par tant de circuits.

Je ne sçay si vous vous estes souvenu, Monsieur, de faire extraire les définitions du dictionnaire de l’Acadcniie françoise. Je souhaiterais fort moy même de les avoir par vostre faveur. En voulant aller d’Angleterre en Hollande j’ay esté retenu quelque temps dans la : Tamise par les vents contraires. En ce temps la ne sçaehant que faire et n’ayant personne dans le vaisseau, que des mariniers, je méditais sur les choses la, et surtout je songeois à mon vieux dessein d’une langue ou écriture rationelle, dont le moindre effect serait l’universalité et la