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Page:Leibniz-en.francais-Gerhardt.Math.1a7.djvu/370

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l’infini réussissent dans le fini, comme s’il y avoit des infiniment petits métaphysiques, quoyqu’on n’en ait point besoin ; et que la division de la matière ne parvienne jamais à les parcelles infiniment petites : c’est par ce que tout se gouverne par raison, et qu’autrement il n’y auroit point de science ny regle, ce qui ne seroit point conforme avec la nature du souverain principe.

Au reste lorsque la lecture du Journal de Trévoux me fit écrire quelque chose sur ce qu’on y disoit contre le calcul des différences, j’avoue que je ne pensay pas à la controverse que vous, Monsieur, ou plustost ceux qui se servent du calcul des différences, ont avec M. Rolle. Ce n’est pas aussi que depuis vostre derniere que j’ay sû, que M. l’Abbé Galloys que j’honnore tousjours beaucoup, y prend part. Peut eslre que son opposition ne vient que de ce qu’il croit que nous fondons la démonstration dé ce calcul sur des paradoxes Métaphysiques dont je tiens moy même qu’on peut bien le dégager. Sans que je m’imagine que ce savant Abbé soit capable de croire que ce calcul est aussi fautif qu’il semble que M. Rolle le dit suivant ce que vous m’apprenés, je n’ay jamais vù encor les ouvrages publiés par cet auteur. Je ne laisse pas de croire qu’il a de la pénétration, et je souhaiterois qu’il la tournât du costé qui luy ouvriroit un champs propre à faire valoir son talent pour l’accroissement des sciences. Cependant son opposition même ne laissera pas de servir à éclaircir les difficultés que les commençans peuvent trouver dans nostre Analyse. Je trouve même qu’il importe beaucoup pour bien établir les fondemens des sciences qu’il y ait de tels contredisans ; c’est ainsi que les Sceptiques combattaient les principes de la Geometrie, avec tout autant de raison ; que le P. Gottignies, Jesuite savant, voulut jetter des meilleurs fondemens de l’Algebre, et que Messieurs Cluver et Nieuwentiit ont combattu depuis peu, quoyque différemment, nostre Analyse infinitesimale. La Geometrie et l’Algebre ont subsisté, et j’espere que nostre Science des infinis ne laissera pas de subsister aussi ; mais elle vous aura une grande obligation à jamais, pour les lumières que vous y repandés. J’ay souvent considéré qu’un Geometre, qui repondroit aux objections de Sextus Empiricus et à celles que François Suarez, auteur du livre quod nihil scitur, envoya à Clavius, ou à d’autres semblables, feroit quelque chose de plus utile qu’on ne s’imaginerait peut estre. C’est pourquoy nous n’avons point sujet de regretter