Page:Leibniz - Nouveaux Essais sur l’entendement humain, 1921.djvu/268

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

naturel de cet or fait par artifice. Des vieux papiers attribuent l’un et l’autre à Auguste, électeur de Saxe ; mais je ne suis pas homme à garantir ce fait. Cependant, s’il était vrai, nous pourrions avoir une définition plus parfaite de l’or que nous n’en avons présentement, et si l’or artificiel se pouvait faire en quantité et à bon marché, comme les alchimistes le prétendent, cette nouvelle épreuve serait de conséquence ; car par son moyen on conserverait au genre humain l’avantage que l’or naturel nous donne dans le commerce par sa rareté, en nous fournissant une matière qui est durable, uniforme, aisée à partager et à reconnaître et précieuse en petit volume. Je me veux servir de cette occasion pour lever une difficulté (voyez le § 50 du chap. Des noms des substances chez l’auteur de l'Essai sur l’Entendement). On objecte qu’en disant : Tout or est fixe, si l’on entend par l’idée de l’or l’amas de quelques qualités où la fixité est comprise, on ne fait qu’une proposition identique et vaine, comme si l’on disait : Le fixe est fixe ; mais si l’on entend un être substantiel, doué d’une certaine essence interne, dont la fixité est une suite, on ne parlera pas intelligiblement, car cette essence réelle est tout à fait inconnue. Je réponds que le corps doué de cette constitution interne est désigné par d’autres marques externes où la fixité n’est point comprise : comme si quelqu’un disait : Le plus pesant de tous les corps est encore un des plus fixes. Mais tout cela n’est que provisionnel, car on pourrait trouver quelque jour un corps volatile, comme pourrait être un mercure nouveau, qui fût plus pesant que l’or, et sur lequel l’or nageât, comme le plomb nage sur notre mercure.

§ 19. Philalèthe. Il est vrai que de cette manière nous ne pouvons jamais connaître précisément le nombre des propriétés, qui dépendent de l’essence réelle de l’or, à moins que nous ne connaissions l’essence de l’or lui-même. § 21. Cependant si nous nous bornons précisément à certaines propriétés, cela nous suffira pour avoir des définitions nominales exactes, qui nous serviront présentement, sauf à nous changer la signification des noms, si quelque nouvelle distinction utile se découvrait. Mais il faut au moins que cette définition réponde à l’usage du nom, et puisse être mise à sa place. Ce qui sert à réfuter ceux qui prétendent que l’étendue fait l’essence du corps, car lorsqu’on dit qu’un corps donne de l’impulsion à un autre, l’absurdité serait manifeste, si, substituant l’étendue, l’on disait que l’étendue met en mouvement une autre étendue par voie d’impulsion, car il faut encore la solidité. De même on ne dira pas que la raison ou ce qui