Aller au contenu

Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/321

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

intelligent que lui-même, mais, au reste, simple amateur très élégant et qui ne pouvait lui porter ombrage ; et enfin parce que Joubert était une singulière et délicieuse créature.

L’autre grand ami, c’est Fontanes. Chateaubriand l’avait connu à Paris, puis retrouvé à Londres dans l’exil, quand ils étaient jeunes tous deux. La constance de leur amitié fut belle. Chateaubriand lui pardonna d’être très tôt rallié à l’Empire, président du Conseil législatif en 1804, grand maître de l’Université en 1808, et sénateur en 1810. Il l’aimait assez pour lui demander continuellement des services (dès 1799), et il consentit toujours à être son obligé, parce que c’était lui. Deux traits me font assez goûter Fontanes. Ce parfait fonctionnaire, cet orateur officiel de l’Empire était un homme d’un tempérament dru, d’une conversation aussi riche et déchaînée que ses écrits étaient polis et mesurés ; il avait dans l’intimité « quelque chose de brusque, d’impétueux et d’athlétique » (Sainte-Beuve) qui l’avait fait comparer par ses amis, dans leurs promenades au jardin des Tuileries, au sanglier d’Érymanthe (« goinfre et gouailleur », l’appelle Peltier). Cet homme si habile se revanchait ainsi de ses prudences et souplesses publiques. Et, pareillement, ce poète un peu timide, ce prosateur tempéré, « classique », eut l’esprit d’applaudir, tout de suite et sans aucune hésitation, aux nouveautés des Natchez et qu’il connut manuscrits.

Puis il y a Chênedollé. Chênedollé mérite