Aller au contenu

Page:Lemaître - Corneille et la Poétique d’Aristote, 1888.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voici : « Il y a quelque apparence que cette condition n’est pas d’une nécessité plus absolue que celle dont je viens de parler (Bon ! le voilà maintenant qui lâche la katharsis !) et qu’elle ne regarde que les tragédies parfaites, non plus que celle-là… Je n’entends pas dire que celles où elle ne se rencontre point soient imparfaites… Mais, par ce mot de tragédies parfaites, j’entends celles du genre le plus sublime et le plus touchant. »

Je crains bien, à ce compte, que ce pauvre Racine n’ait pas de « tragédie parfaite » (car je ne vois que Mithridate, où se rencontre la condition dont il s’agit, et Mithridate, n’est point parfait) ; mais comme le bon Corneille n’a point voulu dire que les tragédies qui ne sont point parfaites soient pour cela imparfaites, on peut encore s’accorder.

Donc, cela est entendu ; rien ne vaut, pour la tragédie, les haines entre proches. Ici, quatre cas se présentent.

Premier cas : « On sait qu’on est du même sang que celui qu’on veut tuer, et on le tue néanmoins. Cela, dit Aristote, n’est point tragique. »

C’est pourtant ce qui arrive dans la Médée d’Euripide, dans l’Agamemnon et dans les Choéphores d’Eschyle et dans l’Electre de Sophocle, des drames qui ont toujours passé pour assez émouvants.

Deuxième cas : « On tue avant de connaître, et on ne connaît qu’après avoir tué (comme dans Œdipe). Cela est un peu plus tragique. »