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Page:Lemaître - Impressions de théâtre, 7e série, 1896.djvu/343

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FRANÇOIS DE CUREL

Cet excellent Bagadais à cru devoir avertir Hubert que sa femme, autrefois, s’était enfuie toute seule, et que, par conséquent, Hubert n’a jamais été… ce qu’il croyait. Cela ennuie le pauvre homme : «… Quand on a vécu pendant des années, se croyant quelque chose, même quelque chose de pas glorieux, et qu’on découvre subitement le contraire, on est dépaysé… » Et puis, il a une peur terrible qu’Anna ne l’accable de la révélation de son innocence et peut-être ne profite de cela pour rester avec lui, de force. Terreur vaine ! Anna l’a assez vu ; elle ne lui parle de rien, et cela le déconcerte à un tel point que c’est lui enfin qui l’oblige à se confesser innocente. « Ainsi, vous saviez ! dit-elle… Mon Dieu, que Hector est donc bavard !… Vraiment cette histoire de ma vertu semble si peu importante !… » Alors, il a, lui, comme un regret de la laisser partir et, s’il osait… Il sollicite un mot d’affection ; il avoue qu’il n’est pas heureux : «… Marguerite n’est pas l’amie qu’il me faudrait… Vous l’avez vue… Vous me voyez… Cela suffit, je n’ai pas besoin d’en dire plus long. » Mais elle : « Je suis restée honnête et ma satisfaction est médiocre ; vous avez servi vos passions, et votre félicité est mince… Mon pauvre ami, tous les chemins mènent à Rome… Je vous plains, plaignez-moi… Je n’ai pas vécu plus seule dans mon abandon que vous dans vos intimités… Il pleut du ciel des croix qui ne choisissent pas les épaules… »