Page:Lemaître - Impressions de théâtre, 7e série, 1896.djvu/349

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plusieurs fois des déclarations un peu gauches, que notre dédaigneuse a sèchement repoussées. Quand il apprend la détresse de Mme et Mlle Boisset : « Ah ! ça, dit le brave garçon, vous ne pouviez donc pas vous adresser à moi ? Je suis riche, tel que vous me voyez. Je gagne des journées de huit francs, j’ai un petit bien et des économies... Vous me rendriez si heureux en me traitant en ami ! » Et pendant qu’il est en train, profitant de l’occasion, qui ne se présentera peut-être plus (car il est timide), il demande la main de Mlle Louise. Puis, bonhomme : « Oh ! je ne vous force pas à me répondre tout de suite... Et d’ailleurs, vous savez ? cela n’a aucun rapport avec l’autre affaire... Ah ! mais non ! il ne faut pas embrouiller les comptes ! »

Restée seule avec sa fille, Mme Boisset lui dit : « Tout de même, ça nous tirerait d’affaire, et Darlot ferait un bon mari. » Et Louise, qui quelques instants auparavant a eu des phrases très nobles et dans la générosité desquelles elle se complaisait visiblement : « Ne te désole pas, maman. Je serai forte. Je ferai de la couture ; je profiterai de mon instruction, je donnerai des leçons à des enfants... Va, nous ne serons pas malheureuses, etc... » Louise tombe en pleurant dans les bras de la vieille dame ; ce qui veut dire : « Eh bien, oui, je l’épouserai... Et ce sera un héroïque sacrifice... mais que ne ferais-je pas pour ton bonheur ? »

Et, ma foi ! nous ne la plaignons qu’à moitié. Nous