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Page:Lemaître - Impressions de théâtre, 7e série, 1896.djvu/351

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femme détournée de son mari par une grossièreté d’esprit, de sentiments et de manières qui offensât douloureusement sa propre délicatesse physique et morale. Et l’étude de ces incompatibilités eût pu être intéressante. Mais il fallait pour cela qu’il y eût entre les deux époux des différences considérables d’intelligence et d’éducation. Or c’est ce que nous ne voyons nullement. Le cœur même (par où Darlot aurait trop d’avantage) mis à part, il ne saute point aux yeux que Louise soit si supérieure que cela à son mari. Il n’est pas vieux, il n’est pas laid. Il a eu, à l’école primaire, son « certificat d’études », et ensuite il a fréquenté des cours d’adultes : c’est dire qu’il est, pour le moins, aussi instruit que sa femme. Il n’est pas bête ; on voit, à plusieurs endroits, qu’il pense et sent par lui-même, qu’il a ses idées. Son parler est imagé et ingénieux. Il a de la finesse. Il commence toujours par dire qu’il est incapable d’exprimer ce qu’il a dans la tête ou dans le cœur, et il finit toujours par l’exprimer, et fort bien, et presque trop délicatement. Il est clair, enfin, par tout ce que nous connaissons de lui, qu’il ne doit apporter aucune indiscrétion ni aucune brutalité dans les témoignages de son amour. C’est un ouvrier dont beaucoup de messieurs pourraient envier l’intelligence et les façons. Très certainement, c’est lui qui est le plus « distingué » et surtout le plus original des deux : il est quelqu’un, au lieu qu’elle me paraît banale comme un mauvais roman. Et elle ne peut