Page:Lemaître - Les Contemporains, sér2, 1897.djvu/181

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Louis XIV et par suite nous présente à la fois l’homme des temps lointains ou des « pays étranges », l’homme du XVIIe siècle et l’homme de tous les temps.

Éliminons l’homme de tous les temps, qui est aussi bien de l’antiquité que du XVIIe siècle. Restent en présence et peut-être en opposition, dans la plupart des personnages, l’homme de l’antiquité grecque ou romaine et l’homme du temps de Louis XIV. Ce désaccord intime est par moments évident et souvent prodigieux, au moins dans certaines pièces. Il y a parfois deux ou trois mille ans, un abîme, entre les actions de tel personnage et ses mœurs, ses manières, ses discours.

Pyrrhus est un sauvage, un brûleur de villes, un tueur de vieillards, de jeunes filles et d’enfants. Hermione, au quatrième acte, lui jette ses exploits à la face. « Je vous aime ; épousez-moi, ou j’égorge votre fils », c’est le fond de ses discours à Andromaque. Mais d’autre part Pyrrhus est poli, galant, « honnête homme ». Les contemporains eux-mêmes sentaient cette contradiction : les uns trouvaient Pyrrhus trop doucereux, les autres trop violent (Voy. la Folle querelle). De même, Oreste a tué sa mère et va tuer Pyrrhus. Cela ne l’empêche point de s’exprimer comme auraient pu faire Guiche et Lauzun en soignant leur style.

Dans Britannicus, il n’y a point de désaccord de ce genre. La marque du principal personnage, c’est justement d’être un criminel fort civilisé, très spirituel