Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/207

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à sa sincérité dans les deux cas. Où a-t-elle dit la vérité ? C’est une autre question et dont chacun décide, le prince aussi bien que M. Taine, par des impressions prises ailleurs.

En somme, le prince Napoléon a démontré que les témoignages dont se sert M. Taine étaient suspects, parce qu’ils émanaient des ennemis de l’empereur. Mais on démontrerait avec la même facilité que les témoignages de ses amis ne sont pas moins suspects, pour d’autres raisons. Alors ?…

Le parti pris du prince est pour le moins aussi imperturbable et aussi artificieux que celui de l’académicien. Seulement, il ne paraît pas s’en douter. Je voudrais pouvoir dire qu’il a d’étonnantes candeurs.

M. Taine ayant rappelé en note qu’on accusait Napoléon « d’avoir séduit ses sœurs l’une après l’autre » : « Ici, dit le prince, je n’éprouve pour l’écrivain qui reproduit de telles infamies qu’un sentiment de commisération. » C’est bientôt dit. J’ignore tout à fait si l’empereur a eu la fantaisie un peu vive qu’on lui prête, et cela m’est égal ; mais je crois qu’il était fort capable de l’avoir. Pourquoi ? Parce que, dans la situation unique qu’il occupait sur la planète et que ses origines rendaient plus extraordinaire, la mesure du bien et du mal ne devait pas lui sembler la même pour lui que pour les autres hommes. Et cela, par la force des choses.