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FRANÇOIS COPPÉE.

de la tournure. Enfin, le sentiment lui-même est nouveau, — cet unique et piquant mélange de mélancolie et de malice, d’attendrissement et d’ironie, qui a dicté Le Banc, Les perirs Bourgeois, Un Fils et La Marchande de journaux. Car ne semble-t-il pas, en vérité, qu’on trouve à la fois chez M. Coppée un témoin naïf et un critique avisé, un poète lyrique et un gamin de Paris ? Mais la malice est sans arrière-pensée, l’ironie est sans fiel, et l’émotion partout domine, pleine de sympathie et de pitié, bien faite pour aller droit au cœur, où elle va.

Les grands poètes romantiques s étaient nourris d’idées et de sentiments généraux ; il les avaient exaltés en des rythmes aux larges ailes, mais à l’essor souvent trop vague. En vertu de l’universelle loi de réaction, après eux devait naître une poésie aux qualités et aux défauts contraires, moins large et plus précise. La poésie de détail, voilà, en effet, ce que représente excellemment M. François Coppée. Il est venu après Victor Hugo comme Téniers après Rubens, comme Gérard Dov après Rembrandt. Pareil à ces « petits maîtres » flamands et hollandais avec lesquels il a tant de ressemblances, il a rapproché l’art de la foule sans l’éloigner des artistes. II plaît aux simples par la simplicité vraie de ses conceptions, aux raffinés par le raffinement merveilleux de son faire ; et c’est pourquoi — rare exception ! — il est de ceux dont la popularité ne saurait diminuer la gloire.

Les œuvres complètes de M. François Coppée ont été éditées par Alphonse Lemerre.

Auguste Dorchain.


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LES AÏEULES




À la fin de juillet les villages sont vides.
Depuis longtemps déjà des nuages livides,
Menaçant d’un prochain orage à l’occident,
Conseillaient la récolte au laboureur prudent.