Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/199

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— Vive sainte Catherine ! bonne fête, meunier !

Dans la chambre, les mères causaient, ayant rapproché leurs chaises.

— Voilà longtemps que je n’ai fêté aussi gaîment la Sainte-Catherine, bien que ce ne soit pas chez moi, disait Gertrude Flamart.

— Voisine, ayez confiance : les temps changeront.

— Non, meunière : il n’y a plus rien à faire à présent, Flamart ne saura jamais remonter son moulin. Mais ce n’est rien pour moi : je suis vieille et je n’ai plus longtemps à souffrir. Mais Monique, voisine ? Que deviendra ma pauvre Monique, voisine ?

— Elle fera un bon mariage et vous donnera du bien-être dans vos vieux jours.

Ah ! voisine, qui voudra de Monique, si elle n’apporte un peu d’argent en dot à son mari ? Flamart veut lui faire épouser le vieux Chicord, mais cela ne sera pas. Non, cela ne peut pas être. Flamart a perdu la tête.

La pauvre meunière frotta alors du revers de sa main deux grosses larmes qui gouttaient sur ses joues décolorées comme les prés en hiver.

— Je vous plains de tout mon cœur, lui dit la mère de Donat en lui prenant la main. On n’est jamais plus malheureuse que dans ses enfants. Et Monique n’est pas heureuse, n’est-ce pas, Gertrude ?

— Ah bien, non ! cria la meunière, quoiqu’il n’y ait pas de cœur comme elle au monde. Non, voisine, il n’existe pas de meilleure fille, aussi douce, aussi serviable envers les pauvres gens, aussi dévouée à ses parents. Ah ! nous sommes bien à plaindre !

— Et si Monique trouvait quelque joli garçon qui lui plût et qui lui apportât en dot un bon moulin, elle n’aurait certainement que ce qu’elle mérite, voisine.