Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/93

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— Six ans, monsieur.

— Monsieur qui ? fit madame Lamy.

— Six ans, monsieur Muller.

— Oh ! n’aie pas peur, dit M. Muller. Je ne suis pas un grand monsieur, moi. J’aime les petits enfants. Tiens ! j’ai apporté une grenouille pour toi. Tu vas rire.

M. Muller tira de sa poche une petite grenouille de bois qui faisait un grand saut quand on appuyait le doigt sur la queue.

Jean n’avait jamais rien vu de si joli. Il se baissait, regardait la grenouille dessous et dessus, riait, les mains derrière son dos.

Et M. Muller, de son côté, sur ses genoux, les paumes à plat, faisait des grimaces pour l’obliger à rire plus fort.

Et il disait :

— Vois. Une, deux, houp ! Qu’est-ce que tu en dis ? N’est-ce pas une jolie bête ? Ça ne fait pas de mal, les grenouilles, et il y en a qui sont vivantes. Tiens, c’est pour toi. Presse sur la queue.

— Allons, monsieur Muller, le café refroidit, dit madame Lamy.

Jean étendu, à présent, tout de son long, faisait sauter la grenouille coup sur coup, puis courait après, et par moments il sautait comme elle, en disant :

— Monsieur Lamy ! monsieur Lamy ! regardez un peu comme c’est drôle ! Qu’est-ce que ça mange, les grenouilles, monsieur Lamy ?

M. Muller était si content qu’il se frappait les cuisses du plat de ses mains en se renversant sur sa chaise avec un gros rire et disait constamment :

— Bon ! C’est ça ! Va toujours. Prends tes pieds dans tes mains et saute.

Il finit par n’y plus tenir lui-même, s’accroupit à