Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/199

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d’une pâle veilleuse qui tremblait sous les voûtes.

— Mon commandant ? où est mon commandant ? furent ses premières paroles.

— Derrière l’église, où sont couchés les braves, répondit un camarade, du lit voisin… Il était encore temps pour toi… et pour moi… Les brancardiers nous ont ramassés… Mais ceux qui dorment sont plus heureux que nous.

La paix signée, après un séjour de trois longs mois à l’hôpital, Baptiste revint seul au Moulin des Prés, avec une large balafre à la tempe gauche et un crêpe au bras.

A Saint-Christophe, tout le monde prit le deuil. Bien que le souvenir de l’héroïque défunt fût encore tout récent dans les cœurs, personne n’osait en parler, dans la crainte de faire déborder le torrent des larmes. Tous y pensaient, les yeux se comprenaient, mais les bouches restaient muettes.

— Baptiste, avait dit Guillaume Desmarennes au matelot, si rien ne t’appelle ailleurs, reste avec nous, mon garçon. Ici le travail n’est pas trop rude. Regarde-toi comme faisant partie de la maison. Ta vie est assurée, et chacun aura pour toi les égards qui sont dus à un digne serviteur respectant comme nous la mémoire de celui que nous pleurons.

Baptiste avait accepté. Il eut son installation