Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/290

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que, sans être encombrantes, les fleurs n’avaient pas été oubliées. De riches bouquets de plantes ornementales (plantes de rivière et plantes de jardin) étaient fort habilement disposés, de manière à réjouir les yeux sans gêner le regard, et permettre à tous les convives de se bien voir et de s’entendre.

Comme l’avait dit Maître Gerbier, M. Grandperrin était un homme tout rond : figure ouverte, cheveux blonds frisés et favoris en côtelettes, également frisés. Né sous une heureuse étoile, il s’était développé dans le sens naturel de ses aptitudes. Fils d’un petit filateur, il était devenu gros filateur. Trapu, de taille moyenne, avec l’intelligence des chiffres, une santé robuste et une volonté non moins robuste, il était devenu très vite un des importants capitalistes de l’époque. C’était un excellent convive, bon mangeur et buveur sérieux sans craindre pour sa raison. Il y a des buveurs intelligents, comme il y a des buveurs bêtes. Lui était un buveur intelligent. On prétendait même que c’était presque toujours après un ample déjeuner qu’il avait remporté ses plus beaux triomphes de tribune et donné ses meilleurs coups de boutoir parlementaires. « Ce diable de Grandperrin, disait-on à la Chambre, quand il est sur lest avec ses trois verres de Porto, ses chiffres nous parlent tout seuls. » Que voulez-vous !