Page:Lemoyne - Poésies, 1871-1883, Lemerre.djvu/118

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Avec leurs cris d’appel et leurs chansons d’amour,
Et, reprenant en chœur toutes ses voix bénies,
Le printemps répétait ses grandes symphonies...
Beethoven n’entendait plus rien... Il était sourd !...

Sourd à toutes les voix, sourd à tous les murmures,
Au vent frais du matin dans les hautes ramures,
Aux bruits mystérieux des sources dans les bois,
Au battoir cliquetant des petites laveuses,
Sur le miroir des eaux souvent toutes rêveuses,
Qui battaient, qui chantaient, qui rêvaient à la fois.

Quand l’orgue, ouvrant le jeu de ses masses chorales,
Relatait sous la nef des vieilles cathédrales,
Sonores jusqu’au fond de leurs caveaux dormants,
Le pauvre dieu martyr en vain prêtait l’oreille ;
À peine croyait-il entendre un vol d’abeille,
Une rumeur confuse en ses bourdonnements.

Obsédé par un sombre et décevant problème,
Beethoven écoutait longuement en lui-même
Un lointain souvenir d’anciens échos perdus ;
À l’heure où le soir tombe, ou quand le jour se lève,
Marcheur silencieux, il renouait en rêve
De merveilleux accords autrefois entendus.