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POÈMES ÉPARS

Va voir, si tu le peux, au seuil de nos cabanes,
 Les pâles et rouges débris
 Des chevelures et des crânes
Qu’en ton sein autrefois ma hache avait surpris.

 Foule de guerriers sans courage,
 Je le sais et tu t’en souviens,
Parce que tu n’aimais qu’un indigne carnage,
 Mes pères ont maudit les tiens.

 Viens donc ! apporte la chaudière,
 Tu boiras le jus de mes os !
 Viens donc ! assouvis ta colère,
Tu ne m’entendras pas pousser de vains sanglots !

 Ils frappent : les haches brisées
 À leurs pieds tombent en éclats ;
 Ils frappent : leurs mains épuisées
 Restent sans vigueur à leurs bras.

Lui, cependant, avec un rire horrible,
Le cou tendu, les yeux sans mouvement,
Sur le roc qui voyait cette lutte terrible,
 Il s’asseyait en murmurant :

 Viens donc ! apporte la chaudière,
 Tu boiras le jus de mes os !
 Viens donc ! assouvis ta colère,
Tu ne m’entendras pas pousser de vains sanglots !