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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/186

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DUVIQUET

à l’envers, aurait pu paraître ironique, appliqué à ce lieutenant de la République devenu chouan de son plein gré. D’ailleurs il avait bonnes façons : vingt-huit ans, une belle taille, des cheveux châtains et des yeux bleus, le nez long, la figure pleine[1]. Il plut dès le premier jour à la société de Bosseny par son ton de galanterie délicate et sa martiale désinvolture. Le Gris-Duval le nomma son major de division et Duviquet eut la politesse de considérer cette promotion comme un avancement.

La Chouannerie était en paix avec la République, il n’est pas inutile de le rappeler ; mais les chefs royalistes n’avaient point pour cela renoncé à leurs grades. Le Gris-Duval, depuis sa soumission, continuait à se considérer comme le successeur de Boishardy au commandement de la division des Côtes-du-Nord ; même il conservait une petite troupe, composée de quelques hommes employés à ses communications avec les autres chefs de la Bretagne ou à la surveillance du territoire de son commandement. Rien de belliqueux ; point de campement ni de démonstrations militaires ; un simple contact permanent avec les municipalités « bien pensantes » de la région qui le renseignaient sur l’esprit des fonctionnaires, les acquéreurs de biens nationaux et la sécurité des lignes de correspondance. Ne faut-il pas, d’ailleurs, s’entourer de quelques défenseurs au cas où les Bleus tenteraient un mauvais coup ? Et puis peut-on abandonner de braves gas, reste des bandes de Boishardy ? Ils ont pris goût à la vie libre ; si on ne les hébergeait que deviendraient-ils ?

  1. Archives nationales, F7 6147.