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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/219

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LA MIRLITANTOUILLE

voir libre le chemin de Merléac par la forêt de Lorges. Hénon n’est qu’à une bonne lieue de La Mirlitantouille ; il doit y avoir des Bleus là-haut. Si le faux avis a manqué son but, on dormira aussi bien dans les ajoncs et les genêts du Mené que dans ce cimetière de village ; si la ruse a porté, il y aura bataille et ce sont là des occasions que ni Carfort ni Mercier ne repoussent jamais. En route. Le soleil est déjà haut ; la troupe de Duviquet, par Cocollain et Brangolo, atteint le bourg de Plémy en une heure de trajet ; on est là à quinze cents pas à peine de La Mirlitantouille ; Duviquet y conduit ses hommes, les fait coucher dans les champs, dans les bruyères, derrière les broussailles et les haies ; lui-même s’avance jusqu’aux abords du cabaret ; il observe : rien n’y bouge ; l’endroit est tout aussi désert, aussi calme qu’à l’ordinaire : les deux masures, de chaque côté du chemin, portes ouvertes, ont leur air accueillant d’habitude. Est-il vraisemblable que la fille Plé et son père, qui les habitent, n’aient point aperçu les Chouans : n’ont-ils rien surpris du mouvement de ces cinquante hommes rampant dans les hautes herbes à quelques pas de l’auberge ? Cet homme et cette femme savent qu’ils ne doivent rien voir, rien entendre, rien dire. Par ce jour ensoleillé ils n’auront donc rien vu, rien entendu ; et, tout à l’heure, ils ne diront rien quand les Bleus sans méfiance arriveront.

Car ils viennent. Vers neuf heures et demie du matin[1], on les voit, sur la route, débouchant de la lande du Val : ce sont d’abord quatre gendarmes à

  1. Archives nationales, BB18 253.