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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/251

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LA MIRLITANTOUILLE

fortune en ce temps de papier sans valeur. Le Gris-Duval, non plus qu’aucun des prévenus, ne possédait une telle somme ; la République seule pouvait la fournir, et l’ami Carfort s’était chargé, on l’a vu, de l’emprunter à l’État, sans autre formalité d’encaissement qu’un léger retard imposé à la diligence de Brest. C’est même pour assurer la réussite de ce virement de fonds que Besné avait accordé, le 13 octobre, au condamné Villemain, la permission de la nuit. Le baril d’écus et d’or porté par les Chouans à Quintin et déposé chez le banquier Mazurié[1], ami de Besné, était mis le jour même à la disposition de l’accusateur public. Il s’en fallait, il est vrai, de deux mille francs que la somme fût complète, mais il en passait des diligences sur la grand’route, et, sous peu, l’une d’elles devait fournir l’appoint[2].

  1. Jean-Baptiste Mazurié, négociant et banquier à Quintin. C’était un républicain de nuance foncée car, pendant la Terreur, il s’était surnommé Mazurié-la-Montagne. L. Dubreuil, La vente des biens nationaux dans les Côtes-du-Nord, p. 109.
  2. Telle est la version officielle de cet incident ; elle fut soumise au ministre par un rapport dont la minute se trouve aux Archives nationales, F7 6147 : — « … Besné a rendu son ordonnance de mise en liberté de cette horde de brigands. Cette libération avait été achetée au poids de l’or et Besné est prévenu d’avoir reçu le prix de cette iniquité chez le citoyen Mazurié, banquier à Quintin avec lequel il est lié d’amitié… Cet acte d’autorité arbitraire est d’autant plus répréhensible qu’il s’agissait d’une horde de Chouans qu’il revomissait sur le sol de la République où ils avaient commis nombre de massacres, que leur chef avait été condamné à mort et ses complices à la déportation… » Dans une lettre du capitaine Delain à Palasne-Champeaux, — même dossier, — on lit : — « Les républicains disent qu’on veut renvoyer du renfort aux voleurs de diligences, car Villemain, qui était de cette bande scélérate, a été sorti pour aller voler les 22.000 livres… Les forces me manquent ; je ne puis en dire davantage. » M. de Kerigant dans ses souvenirs, — Les Chouans, p. 76, — relate que sa mère « combla de cadeaux la famille de Palasne-Champeaux, président du Conseil de guerre :