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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

de la république[1]. On espérait généralement que la condamnation capitale serait annulée par le tribunal de révision, siégeant à Rennes, et qu’une nouvelle juridiction se montrerait plus clémente. Le tribunal de révision confirma la sentence de mort. Il ne restait plus qu’à dresser l’échafaud.

Bien que tant d’années de luttes, de drames, de haines et de larmes, tant de sang versé eussent usé la pitié et durci les cœurs, on s’offusquait de l’implacabilité des juges, frappant, à défaut des vrais coupables qu’ils ne parvenaient pas à saisir, une femme dont la faute paraissait vénielle au regard des grands crimes impunis. On s’indignait aussi des procédés de l’instruction, des pièges tendus à la malheureuse : pour la perdre on avait utilisé Giraudeau et d’autres « moutons » admis à déposer contre elle, et déjà se manifestait un soulèvement d’opinions en faveur de la condamnée. Madame Le Gris-Duval, toujours emprisonnée à Rennes, ne pouvait agir ; mais sa sœur, madame de Kerigant, quoique contrainte à se cacher en sa qualité de contumace, mettait en mouvement toutes ses relations, afin de sauver la condamnée, et l’on a la certitude que ni Kerigant, ni Le Gris-Duval ne restaient inactifs ; du jour où l’on apprit à Saint-Brieuc que le subtil cabaleur de Bosseny s’intéressait à la prisonnière, le cachot où celle-ci était enfermée « au secret et sous verrous » fut gardé par huit hommes armés[2].

C’est bien certainement à l’instigation de madame de Kerigant que l’avocat Laënnec était passé, « par

  1. É. Sageret, Le Morbihan sous le Consulat, I, p. 276.
  2. Archives nationales, BB18 253.