Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/168

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le peu de vie que la Providence nous accorde à combattre les ennemis qui nous environnent. Nous jurons par les poignards rougis du sang des martyrs de la Révolution, et depuis aiguisés contre nous, d’exterminer jusqu’au dernier les scélérats qui voudraient nous ravir le bonheur et la liberté !… » Inquiétante allusion à de nouveaux ennemis que sa méfiance soupçonnait déjà ; Voulland le comprit sans doute : ce pauvre homme était vraiment gêné de présider une séance si dramatique sans pouvoir placer son mot : il glissa que lui aussi avait été menacé de mort, et par une femme ; mais il se hâta de rassurer ses frères : « Il n’y a plus de danger ; le tribunal a fait justice de cette citoyenne, il y a deux jours[1]. »

Des applaudissements unanimes et prolongés ont salué le discours de Robespierre, discours « où brillent la vraie bravoure, la grandeur d’âme républicaine, le plus généreux dévouement à la cause de la liberté et la philosophie la plus prononcée[2] ». Maximilien est donc bien sûr d’avoir évincé son rival, quand un frère, peu perspicace, Rousselin, lance la motion de décerner au brave Geffroy les honneurs civiques dans la Fête qui se prépare pour le 20 prairial. Si la proposition est votée, Collot et son sauveur seront les héros de la cérémonie… Robespierre reprend aussitôt la parole ; en quelques mots le maladroit ou perfide Rousselin est exécuté, présenté somme un suppôt des tyrans, un voleur, pis encore, un dantoniste attardé ; il est sur-le-champ exclu de la Société, jeté à la porte, et

  1. Aulard, La Société des Jacobins, VI, 153 et s.
  2. Moniteur, cité par Aulard. Idem, 155.