Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/169

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traduit au Comité de sûreté générale, pour avoir osé détourner sur le seul blessé du « massacre » l’intérêt qui ne doit s’attacher qu’à l’Incorruptible. À celui-ci, décidément, rien ne résistait : il bravait même impunément le ridicule. Un bon vent le poussait en poupe : il était prudent de se mettre dans son sillage ; le 16 prairial au soir, quatre jours avant la Fête, il était, à l’unanimité, élu président de la Convention[1].



Paris était en liesse dans l’attente de cette Fête dont il se promettait merveille ; jusque dans les prisons on s’apprêtait à célébrer l’Être suprême, avec la pensée que les mauvais jours étaient passés : du moment que le Gouvernement décrétait l’existence du Bon Dieu, fût-ce d’un Bon Dieu révolutionnaire, n’était-ce point pronostic d’une ère de justice, voire de clémence ? Et puis, grande nouveauté, le peuple allait jouer son rôle dans la cérémonie : David en avait tracé le programme pompeux et grandiloquent, sous l’inspiration manifeste de Robespierre, et tout y était prévu et réglé, jusqu’à l’enthousiasme, jusqu’aux pleurs de joie des assistants, jusqu’à la beauté du jour et à l’éclat du soleil : « Déjà les sons d’une musique guerrière retentissent de toutes parts et font succéder au calme du sommeil un réveil enchanteur… À l’aspect de l’astre bienfaisant… amis, frères, époux, enfants, vieillards et mères s’embrassent… les portiques se

  1. Archives nationales, C 304, Cii 1117-18. Séance du 16 prairial au soir.