Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/297

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le déjeuner pris « en famille[1] » ; au conseil de Duplay lui recommandant de se méfier il répondit qu’il était tranquille : « la masse de la Convention est pure[2] » Mieux frisé et plus pomponné encore qu’à l’ordinaire[3], il avait revêtu son bel habit de drap de soie violet et sa culotte de nankin du jour de l’Être suprême. Encadré de ses gardes du corps à gourdins, il gagna les Tuileries où la presse était grande : les tribunes regorgeaient depuis cinq heures du matin[4], les anti-salles, les couloirs, la barre, l’enceinte même des députés, obstrués par une foule turbulente où figuraient bon nombre des aides de camp d’Hanriot et de Jacobins en renom. Le bruyant public des tribunes, empressé de manifester, applaudit l’entrée de Robespierre qui se plaça, comme il le faisait d’habitude, au premier rang de la Montagne, tout près de la tribune.

À onze heures, les députés étaient à leur poste : Thuriot occupait le fauteuil[5] en attendant le président Collot d’Herbois, retenu au Comité. Dans le bruit des conversations et l’inattention de tous, les secrétaires donnent lecture de la correspondance et du procès-verbal de la veille. Tout à coup le drame commence. Saint-Just monte à la tribune : visage sévère enfoui dans une large cravate au nœud prétentieux ; habit couleur chamois, culotte de drap gris clair, gilet blanc[6], des anneaux d’or

  1. Archives nationales, W 501, Déclaration de Didiée.
  2. Buchez et Roux, Histoire parlementaire, XXXIV, 3.
  3. Barère, Mémoires, II, 220.
  4. Idem, 222.
  5. Le Républicain français, 10 thermidor, n° 614.
  6. É. Fleury, Saint-Just et la Terreur, II, 370.