Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/299

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la tribune pour s’en emparer, une grande huée le cloue sur place : « À bas ! À bas le tyran ! » Tallien relève Billaud qui, à bout de souffle, reste pourtant à ses côtés pour l’épauler au besoin. Robespierre est parvenu à monter les marches ; il se tient contre eux, coude à coude, prêt à profiter du premier arrêt pour prendre la parole ; mais Tallien est lancé ; il brandit un poignard pour frapper « le nouveau Cromwell », exige le châtiment « des hommes crapuleux et perdus de débauche qui le servent ». La Convention acclame ; elle se sent renaître ; les décrets pleuvent : arrestation d’Hanriot et de ses aides de camp, de Dumas, président de l’odieux Tribunal, de Boullanger, de Nicolas, de Payan, de tout l’état-major, de tous les adjudants des conspirateurs. Si, quand l’autre reprend haleine, Robespierre fait mine d’interrompre, la sonnette du président couvre sa voix, déjà brisée, et un ouragan d’imprécations déferle : « À bas ! tu n’as pas la parole, tyran ! » Et on réclame Barère qui monte à la tribune.

Ils y sont quatre maintenant, encombrant l’étroit espace ; Maximilien refoulé, essayant de se cramponner, est obligé de quitter la place ; mais il reste au bas des marches, le chapeau à la main, tout près de Couthon que, tantôt, son gendarme a déposé là, et de Saint-Just, impassible, les bras croisés, pareil à une figure de marbre appuyée contre la boiserie de la tribune. Après Barère, c’est Vadier, qui ressasse son thème favori : pour la dixième fois, il répète l’histoire de la Mère de Dieu. Plus de précautions oratoires : il la truffe d’allusions « au personnage astucieux qui sait prendre tous les masques…