Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/338

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Atroce agonie. Lui qui a si douloureusement souffert des tristesses de son enfance et des humiliations de ses débuts, qui s’est tant efforcé à s’en revancher, dans l’espoir peut-être d’abolir, en son esprit qu’elles ont aigri, leur lancinant souvenir, il se retrouve là, piétiné, bafoué, honni, misérable, distillant goutte à goutte l’affront suprême d’être définitivement vaincu, l’amertume affreuse de sa vie manquée, la honte de sa dernière aventure, où il n’a montré, – lui, si sûr de son génie, – ni prévoyance, ni habileté, ni énergie, ni clairvoyance, ni pénétration politique. Il n’aura été grand qu’aux yeux du vulgaire, redouté que par les timides, louangé que par des hypocrites, et son nom passera dans l’histoire comme celui d’un médiocre ambitieux, d’un sectaire brouillon, hargneux et jaloux. Une heure, une seule heure rayonnante en compensation de si cruels déboires, celle où il a vu Paris à ses pieds, parmi les mélodies et les fanfares ; et cette Fête, à laquelle il mêlait Dieu, et dont Dieu, décidément, était absent, a marqué le premier pas vers sa déchéance. Quelle énigme qu’une telle existence, à la fois si néfaste et si torturée, sans joies, toute d’âpres luttes et de haine ! Quel but mystérieux sous cette prétention de ramener l’âge d’or par la Terreur et l’échafaud ? Maintenant, il ne parlera plus ; on ne saura jamais quelle fut sa chimère et l’on pourra discuter indéfiniment sans découvrir s’il fut l’instrument d’un parti occulte, un utopiste, un monomane, ou simplement un envieux atrabilaire, victime d’un fiel atavique. Qui le considère comme un précurseur, un bienfaiteur du peuple, fait penser à ce mot d’un démocrate, désabusé :