Page:Leo - Aline-Ali.djvu/208

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Elle pencha son beau visage, où courut une pâleur subite.

« Si je vous parle tant de Paolo, reprit Ali, c’est qu’il m’attend en ce moment même, et vous seriez bonne de lui causer cette charmante surprise de m’accompagner chez lui. Il vous aime tant, qu’il sera heureux de vous consacrer l’heure de notre habituelle causerie, et je n’en serai pas jaloux.

— Je le crois ! » dit-elle avec amertume.

Elle se leva, marcha d’un pas agité dans la chambre, joignit les mains, murmura des paroles inintelligibles, et tout à coup sortit en jetant ce mot :

« Adieu ! »

Ali, resté seul, tomba dans une douloureuse méditation. Sans doute il se demandait ce qu’il devait faire dans une telle épreuve, la plus redoutable de toutes pour l’amitié. Prévenir Paolo, c’était lui porter un coup terrible, et, d’ailleurs, qu’alléguer de précis contre Rosina ? Elle pouvait aisément se plaindre d’une interprétation coupable donnée à des paroles innocentes. Quelque diverses que soient les affections, au fond, le sentiment qui les produit est le même, et tient sous toutes ses formes à peu près le même langage. Partir ? Mais outre la douleur d’une séparation pour les deux amis, c’était livrer Paolo sans consolation et sans défense aux dangers d’un amour aveugle.

Ali n’alla pas le soir au théâtre. À minuit, il reçut ce billet de Rosina :

« Le silence est vain désormais. Vous m’avez comprise ; dès lors, à quoi bon des réticences ? Vous m’avez comprise, trop, ou pas assez. J’ai besoin de vous dévoiler toute mon âme ; il faut que vous m’en-