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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/214

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naïf à la place d’un autre, voilà tout. Lasse de l’amour sensuel, vous voulez goûter de l’amour chaste, et vous croyez pouvoir passer ainsi de l’un à l’autre ? Mais un abîme les sépare, et s’il vous est jamais possible de le franchir, ce ne sera pas d’un seul bond. Vous regrettez la chasteté ? soyez chaste ; vous vous êtes donnée trop facilement, reprenez-vous. Soyez fière. Peu importe que ce soit mon bras, ou celui d’un autre, qui vous soutienne, si vous n’êtes capable de marcher seule. Toute régénération, pour n’être pas vaine, doit commencer par le recueillement, pour finir par la possession de soi-même. Pour vous, pour beaucoup d’autres, pour toutes les femmes, l’orgueil, à ce moment où nous sommes, est devenu la suprême vertu.

— L’orgueil, cria-t-elle, furieuse et terrible. Prends garde : il souffle la vengeance !

— Vous n’êtes que passionnée, lui dit-il ; nous ne pouvons nous comprendre. Laissez-moi partir. »

Mais au premier pas qu’il fit, elle se jeta vers la porte et lui barra le passage. Éperdue, haletante, égarée, sentant que s’il passait le seuil elle le perdait à jamais, elle en appelait à l’impossible, et des lueurs de haine, d’amour effréné, d’espoir, passaient tour à tour sur son visage.

« Dur ! sans pitié ! dit-elle en frappant l’une dans l’autre ses deux belles mains ; dur ! sans pitié !… Si je meurs, n’auras-tu pas de remords ! Cruel enfant, tu n’as jamais aimé ; tu ignores… Ah ! quand je vais me retrouver seule ici, t’appelant en vain, cherchant de vaines traces de toi, n’embrassant que ma chimère, et séparée de ma vie qui est toi… Ne m’inflige pas un pareil supplice, non, si tu as quelque respect