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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/271

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sait à tous deux également redoutable. Elle, enfoncée dans son fauteuil, la jambe allongée sur un coussin, détournant un peu la tête, semblait tout occupée de suivre les jeux de la flamme sautillante et claire qui se tordait autour des bûches résineuses. Paul, accoudé, les yeux à demi couverts par sa main, la contemplait, étourdi encore de cet entrechoquement du présent et du passé, tout à coup séparés par un abîme ; encore tout ébloui de cet éclair, qui lui dévoilait un ciel nouveau.

Lui ! devenu Elle ! accomplissement d’un rêve qu’il n’eût jamais osé formuler, mais qui gisait pourtant dans les profondeurs de sa pensée, de son désir, dans toutes les aspirations de son être ! Déjà, combien il l’avait adorée ! surpris de tant d’exaltation dans l’amitié, mais cédant à un charme irrésistible, à la grande et secrète magie de la nature ?

À présent, même encore, l’être qu’il aimait avant tout, c’était bien assurément ce frère, cet ami, dont il avait éprouvé la noblesse, le dévouement, les qualités charmantes et sublimes ; seulement, ce qui le rendait heureux jusqu’au délire, c’était de pouvoir la chérir, l’idolâtrer, dans toute la plénitude des forces humaines, de faire de cet amour le seul but, la raison d’être de son existence, de se perdre et de s’absorber en lui tout entier !…

Elle ! mon Dieu, qui l’aurait cru ? En vain cette idée, sous une forme ou sous une autre, était venue frapper aux portes de son cerveau ; il l’avait toujours écartée, et ne l’avait même pas entendue. Ce jeune homme, présenté, conduit par son père, pouvait-on supposer ?…

Si ferme, si résolue, si hardie, si chaste, quelle