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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/286

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à qui parler. Ainsi donc, il ne sera pas dit que je vous aurai quitté. J’en suis bien aise.

« Et puis, reprit-il en voyant que les deux amis se taisaient, il me semble que la mélancolie vous prend tout comme moi. Depuis hier, vous êtes tout tristes et ne mangez plus. Le café n’est-il plus bon ?

— Excellent, père Favre, dit Ali.

— Eh bien, on ne s’en douterait pas à vous voir faire. Ah ! l’air d’en bas, allez, va nous faire du bien à tous trois, ce bon air tout sonnant de vie, où chantent ensemble les voix des hommes et celles des cloches, le bruit des sabots et des moulins, et les cris de la marmaille, et les sifflements des merles, et tous les bruits qui s’élèvent d’une assemblée d’êtres sur cette terre. Tenez, je suis voisin de la mère Mioule, la plus criarde femelle de ce monde, et parfois je suis si agacé de l’entendre brailler après ses petits, que, respect à vous, messieurs, je l’envoie au diable, bien que ce soit un péché ; eh bien, croiriez-vous à présent que de penser à la voix de la mère Mioule, j’en ai le cœur attendri ? J’aime bien la montagne ; mais avec des troupeaux et des armaillis. Oui, tout ce qui est dans la Bible est la vérité… Il ne faut pas que l’homme soit seul et…

— Paul, dit Ali, avant de quitter Solalex, je veux revoir le lieu où mon père… »

Sa voix faiblit sous le surcroît d’émotion que ce souvenir lui apportait.

« Alors, dit Paul d’une voix altérée, ce ne peut être demain…

— Pourquoi pas ? dit Favre, nous pouvons y aller aujourd’hui. Seulement, je crains que M. Ali n’ait là une surprise.