tés, de tout mon être… Ma vie entière n’est plus qu’une aspiration vers toi.
Sans cesse, là, dans ma solitude, réunissant le souvenir du passé au sentiment du présent, je retombe dans cette sensation indicible de la découverte où le ciel s’ouvrit à mes yeux, où je te vis femme ; où de cette amitié, sans nom possible, pleine de pressentiments, de ravissements secrets, je me sentis tout à coup emporté sur des ailes de flamme à ces sommets de l’amour que jusqu’ici nul autre sans doute que ton amant n’a pu atteindre ; car dans ces bas-fonds de l’habitude où se traîne la vie ordinaire, la femme, être fugitif, indécis, à demi étranger à l’homme, n’est que l’ébauche d’une âme et trouble surtout les sens. Toi, déjà mon frère, mon ami, centre déjà de toutes mes pensées, de ma plus vive tendresse, moitié de ma vie, toi, cette puissance de plus !… Quand ces idées, quand ces deux courants d’amour se rencontrent en moi, j’éprouve toujours le même coup de foudre ; je m’agenouille, palpitant, devant le miracle, et me reprends à t’adorer avec des joies nouvelles. Il ne manquait à l’enchantement que ce philtre, et tu l’as versé. Ô cher être unique ! J’ai beau considérer tous ceux que j’ai connus en cette vie, toi seul es complet. Tu m’offres l’infini dans l’être ; tu es divin !
Quand j’étudiais, enfant, nos classiques, les passages qui me frappaient de l’intérêt le plus vif, que je ne me lassais point de relire, c’étaient les scènes où se révèle au héros la divinité protectrice, alors que « la grâce de sa démarche trahit la déesse. » Et moi aussi, comme le héros, je demeurais éperdu. Que de fois j’ai relu surtout l’admirable page, tout