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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/299

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Plus de cent lieues nous séparent, mon Paolo ; depuis deux jours écoulés je n’ai pas entendu ta voix ; cela me semble étrange, horriblement triste, et déjà, dans ce nid de famille où je suis née, où j’ai grandi, je me sens comme en exil.

Ce départ m’a rempli d’une agitation que je n’ai pu calmer encore. Te quitter, va, je le sens bien, c’est résister à une force vivante, à une de ces lois qui sont l’ordre vrai des choses. Tu es devenu le centre de ma vie ; tu es toute ma famille en ce monde, frère chéri. Notre parenté vient d’un fluide plus pur que le sang, et ces quelques mois passés ensemble ont noué entre nous des habitudes éternelles.

Aussi ai-je déjà peur de ne pas trouver ici le calme que j’y suis venue chercher. Je voulais mettre plus d’ordre et de précision dans mes idées ; mais quel trouble et quel désordre que de ne plus être avec toi ! Et puis, tu souffres de mon départ, tu m’accuses, je le sens, et le poids de ta souffrance, jointe à la mienne, et ton mécontentement, m’oppressent, me causent un tourment presque insupportable. Sois plus calme, je t’en prie, pour que je le sois moi-même, que je puisse méditer sérieusement sur notre destinée, et la comprendre et la vouloir telle qu’elle doit être.

Tu t’es refusé à comprendre mon départ, et je ne t’en ai point donné, je le sais, une explication complète. Mais peut-être vaut-il mieux la suspendre encore. Dans la situation nouvelle où nous sommes, quant à cette différence que tu pressens entre nous, et qui doit être effacée, lequel de nous deux se devra rendre au sentiment de l’autre ? Je désire, j’espère que ce sera moi. Mais laisse-moi me recueillir un