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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/322

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— Ah ! sans doute !… Mais nous n’avons jusqu’ici que des solutions économiques bien lentes et bien incertaines. L’abolition de la première féodalité n’a été qu’un pas d’enfant dans la voie de la justice. Un obstacle visible et tangible existait, on l’a brisé ; mais le mal persiste ; il est dans l’air, dans le sol, dans la nature humaine actuelle. Au fond, le servage n’est et n’a jamais été que la pauvreté. Comment détruire ? À l’attaquer, parfois on se heurte contre le bouclier sacré de la liberté. On parle d’association ; là, je crois, est le remède ; mais on est encore aux tâtonnements, et je ne sais…

— Moi non plus, je ne sais, reprit Mlle de Maurignan ; mais ce qu’un seul ignore, et seul chercherait toujours peut-être, tous ensemble le peuvent trouver. Au fond, c’est l’ignorance qui, à tous ses degrés, est la source du mal en ce monde, et surtout chez ces déshérités de toutes richesses, qui ne savent pas même gagner leur pain noir, et qui pourtant, dans leur foi stupide, considèrent la science comme inutile et même dangereuse. J’ignore par quels moyens on pourrait établir une répartition équitable ; mais ce dont je suis sûre, c’est qu’en attaquant l’ignorance, j’attaque la cause de tout mal ; c’est là que se porteront mes efforts. Toute châtelaine doit faire l’aumône ; moi, c’est de la lumière qu’au lieu d’or je prétends donner.

— Et ton aumône sera mille fois plus féconde ! s’écria Paul, en contemplant avec une adoration indicible sa compagne, sur laquelle se jouaient, comme des sylphes amoureux, les rayons tamisés à travers le feuillage. — Tu as raison, ajouta-t-il ; oui, c’est bien là ce qu’il faut faire. Tu vas au bien et