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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/377

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planer dans l’espace, il rampe et s’enfonce en des ornières sans cesse agrandies, où l’équipage rustique, remorquant le carrosse du sacre et la bannière du saint-sacrement, se balance lourdement, et va s’embourbant de plus en plus — à moins qu’il ne verse.

Assurément, c’était une illusion absurde ; mais j’avais conçu l’espérance d’intéresser à mon entreprise de défrichement intellectuel des capitaux, ou, pour parler plus net et dévoiler toute l’étendue de ma folie, des capitalistes. Ils me rirent au nez, m’assurant que le monde n’allait pas si mal, bien que l’ignorance eût l’empire, et précisément à cause de cela. On me représenta ce que je savais déjà par le Moniteur, combien la situation de la France était florissante, et quel bon sens supérieur à tout savoir éclatait dans les heureux choix faits par nos populations. J’insistai : je parlai d’intérêts plus étendus que ceux du présent, et mille fois plus considérables que ceux de la rente ; les plus polis sourirent, les plus libéraux me trouvèrent de mauvais goût. On me parla de journaux destinés à représenter des nuances nouvelles ; il me fallait le rayon solaire tout entier.

Découragé, chagrin, je confiais mes déceptions à un ami, quand il me dit :

Il faut que je vous adresse à Mlle de Maurignan. Elle vous aidera. »

Je connaissais ce nom vaguement, comme celui d’une personne bienfaisante, fondatrice d’œuvres qui tendaient à relever la moralité des femmes par l’instruction et par le travail ; mais je n’eusse point supposé qu’elle s’associât volontiers à une