Page:Leo - Aline-Ali.djvu/385

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à remplir dans la maison le rôle de surveillante.

« Nous n’avons pas de surveillantes, monsieur, dit Mlle de Maurignan, mais seulement des institutrices. Et puis, très-probablement, cette personne, dont les principes ont votre approbation, professe une morale contraire à la nôtre ?

— Votre morale, mademoiselle, dit le prêtre d’un ton aimable, est aussi la nôtre, puisqu’elle consiste à faire le bien.

— Vous ignorez alors, monsieur, que ce mot de bien a pour vous et pour moi une signification opposée ? Notre but diffère aussi bien que nos moyens. »

La voix du prêtre s’éleva, chargée d’une assez vive émotion.

« Permettez-moi, dit-il avec ironie, d’hésiter à croire que vous ayez dépassé l’Évangile et Notre Seigneur Jésus.

— De toute la distance, reprit Mlle de Maurignan d’un ton calme, qui sépare la justice de la fraternité, le droit de l’arbitraire, et la logique des contradictions. Et cependant, si importantes que soient ces conquêtes, à peine ébauchées, l’humanité n’a pas le droit d’en être bien fière ; car elle a mis, grâce à vos entraves, plus de dix-huit siècles à cela. Mais nous n’avons pas à faire ici, monsieur, l’inutile effort de nous convaincre l’un l’autre. Les forces de la démocratie sont encore petites et bien éparses ; les vôtres sont groupées et nombreuses ; vous avez plus d’asiles et d’institutions que nous…

— Et voilà, s’écria le prêtre, la tolérance des libres-penseurs !…

— Vous confondez, monsieur, reprit Mlle de Mau-