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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/57

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blics, dont nul ne doute et que mon père sait aussi bien que moi.

— Mon père ! lui qui estime tant Germain !

— Eh ! son estime n’en est point gênée. Ce n’est là qu’un de ces épisodes d’une jeunesse dorée, qui posent poétiquement un homme. Quelques bonnes âmes plaignent la comtesse de Rennberg ; le plus grand nombre l’insulte et la raille ; mais pour Germain, cette passion adultère est un triomphe. J’en sais même qui, à ce propos, ont loué ses mœurs. Car, lui aussi, sans doute, après avoir séduit et possédé cette femme, l’a abandonnée par respect pour ses devoirs. Il aura joint, lui aussi, l’hypocrisie à l’inconstance, et se sera retiré en lui jetant une leçon pour adieu, drapé dans l’inaltérable supériorité qui leur fait traverser le crime et la fange sans en garder de souillure. »

La marquise parlait ainsi de son ton amer, de sa voix stridente, debout, la main crispée sur le bord d’une table d’ébène, et de courtes larmes, qui s’arrêtaient à ses paupières, les brûlaient. Frappée au cœur, Aline, en serrant ses mains crispées, marcha jusqu’à l’autre extrémité de la chambre, revint sur ses pas en murmurant des paroles confuses, et se laissa tomber, éplorée, dans un fauteuil.

Mme de Chabreuil se rapprocha d’elle et lui prit les mains :

« Pardonne-moi, lui dit-elle, chère sœur, l’épreuve que je t’impose en ce moment, afin de te préserver d’une souffrance plus irrémédiable. Tu n’aurais pu qu’au fond du gouffre mesurer sa profondeur : je t’amène au bord, et d’en haut te le fais voir. Maintenant, tu es libre de n’y pas descendre,