Page:Leo - Grazia.djvu/122

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vrai que nulle monture n’est plus douce que celle de ces petits chevaux sardes, pleins de courage et de vigueur, dont l’amble est l’allure habituelle. Le Sarde, qui passe la moitié de sa vie à cheval, les dresse à cette allure en leur attachant les pieds latéralement et en les forçant, par un nœud coulant, à se mouvoir ainsi. Malheureusement, il faut le dire en passant, ce peuple n’a pas plus le respect de la souffrance des animaux que celui de la vie humaine. J’étais souvent révolté de la barbarie usitée vis-à-vis de ces serviteurs patients et utiles, que l’homme devrait traiter en auxiliaires. C’est en Sardaigne seulement que j’ai vu le bœuf conduit en laisse à l’aide d’un nœud coulant, passé autour de l’oreille, et qui souvent l’ensanglante et la déchire, tandis qu’un long aiguillon lui laboure les flancs. Ces animaux sont en outre fort mal nourris et ne reçoivent aucun soin, pas même un abri. Ils passent les nuits, hiver comme été, dans des enclos, où ce qui manque le plus, par les chaleurs, c’est l’herbe et l’ombrage. Certainement, c’est à cette incurie et à ces mauvais traitements qu’il faut attribuer la dégénérescence et la petitesse du bétail en Sardaigne.

Avant d’arriver au presbytère, j’avais déjà de nombreux détails sur le signor vicario.

— Vous serez fameusement bien reçu, signor, m’avait dit Cabizudu ; à moins pourtant que la Nanina n’ait ses lubies. Mais don Gaetano a de bon vin, et il n’en sera pas avare pour un ami de don Effisio. Ils étaient parents, don Gaetano et le père de notre jeune maître, et c’est pourquoi il signor vicario a voulu quelque temps se charger d’instruire don Effisio ; mais non pas par besoin, signor, car il en a refusé bien d’autres ! C’est un homme riche que don Gaetano. D’abord il a eu l’héritage de ses parents par la mort de ses frères, et puis il s’y entend à faire valoir son bien ! Ah ! quoiqu’il soit le vicario, il ne faut pas venir lui demander grâce pour le loyer de ses maisons ou de ses terres. Euh…